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L’intimidation en contexte sportif 

En contexte sportif, les tensions peuvent monter rapidement. L’esprit compétitif peut créer des rivalités et l’énergie des participant·es est parfois transformée en frustration ou en agression. Cet article de blogue offre des pistes de réflexion pour prévenir la violence et l’intimidation en milieu sportif ainsi que pour réagir de manière adéquate à ces situations. 

Évidemment, la violence fait partie de plusieurs sports. Dans les sports de combat, la violence est centrale à la compétition et à l’entrainement, alors qu’au hockey, les accrochages et les placages sont chose courante. Bien évidemment, ces violences sont encadrées par des règles et mènent à des conséquences lorsque ce cadre n’est pas respecté (retrait de point, retrait du jeu,  expulsion, etc.).  Ce n’est pas de cela dont il sera question. 

On parle plutôt des formes de violences qui n’ont pas leur place dans le contexte sportif. Qu’elles arrivent lors d’un entrainement, dans les vestiaires, dans les estrades ou au cours d’une partie, ces actions causent de la souffrance (physique, psychologique, matérielle ou émotionnelle) aux personnes qui les subissent. Il est donc important de mettre en place des protocoles dans le but de les prévenir et d’y mettre fin. 

Le cas le plus apparent est l’éclat de violence entre des membres de deux équipes : Deux hockeyeur·ses jettent les gants, les boxeur·ses n’écoutent pas le son de la cloche ou les consignes de l’arbitre, etc. Peu importe, les personnes qui encadrent les participant·es doivent mettre au clair que ces comportements sont inacceptables : Même si on a besoin de toi, même si tu performes bien, les comportements de ce type ne sont pas tolérés dans le cadre de l’activité sportive. Pour éviter ces réactions émotionnelles fortes, il est important de nommer vos attentes et les conséquences qui s’en suivront au niveau organisationnel au préalable. Mentionnez le but de leur pratique sportive et l’impertinence de ces débordements. Sur le coup, en tant qu’intervenant·es, entraineur·ses ou organisateur·rices ne vous investissez pas émotionnellement, gardez votre calme et tentez de ramener votre équipe au calme ; donnez l’exemple !  

 

Violences entre pairs 

Certaines situations sont plus insidieuses. Au sein d’une équipe, des dynamiques de pouvoir peuvent s’installer entre les participant·es et avec l’équipe d’entrainement. En tant que responsables, vous devez garder une distance professionnelle avec les membres de votre équipe. Vous avez le droit d’apprécier certaines personnes plus que d’autres, mais vous ne devez pas le laisser paraître au reste de l’équipe. Tous et toutes ont le droit au respect et vous vous devez de les inclure. 

Si des comportements violents émergent, il est de votre responsabilité d’y mettre fin le plus rapidement possible. En ce sens, il est fortement recommandé d’établir un protocole d’intervention avant d’observer des situations problématiques. Premièrement, il est primordial de croire sur-le-champ les personnes qui dénoncent des violences. Peu importe la relation que l’on peut avoir avec la personne en question, leur dénonciation doit être prise au sérieux. Deuxièmement, il faut rencontrer les personnes impliquées séparément. Il n’y a pas de place pour la médiation. La personne qui a subi les violences sera rencontrée en premier, dans un bureau, 1 à 1 en prenant des notes (qu’est-ce qui s’est passé ? À quel moment ? Y avait-il d’autres personnes ? etc.). En procédant de cette manière, on lui démontre que l’on prend la situation au sérieux.  Ensuite, on rencontre la personne qui a perpétré les violences pour lui expliquer que les comportements étaient inacceptables et lui nommer les conséquences qui s’en suivront (retrait, expulsion si les comportements continuent, etc.). Il est aussi important d’intervenir auprès du groupe, mais surtout auprès des personnes qui ont été témoins de la situation. Ces interventions devraient toujours mettre l’accent sur le fait que la violence n’est jamais tolérée dans votre milieu et sur la capacité des individu∙es à intervenir en demandant à la personne d’arrêter, en montrant de l’empathie à la personne visée et en dénonçant aux responsables du milieu. 

Les initiations sportives sont souvent le théâtre de violences physiques, psychologiques et sexuelles entre les initié·es et les membres de l'équipe. Donc, il est recommandé d’encadrer les initiations du meilleur de vos capacités. Dans un même ordre d’idée, la pratique du « bizutage »1, qui consiste à narguer les nouveaux·elles membres d’une équipe sportive, constitue souvent de la violence psychologique et même parfois de la violence physique ou matérielle. Veillez à mettre en place des facteurs de protection en prévoyant des espaces et des moments où la dénonciation de ces violences est possible. 

 

Violences de l’équipe d’entrainement 

De votre côté, faites attention à ne pas stigmatiser des personnes selon leurs caractéristiques personnelles, leurs capacités ou leur identité. Les propos discriminatoires de toute sorte sont inacceptables et peuvent participer à l’isolement et à la baisse de l’estime de soi des personnes qui les subissent. Selon la recension de l’INSPQ, les entraineur·ses sportif∙ves sont « responsable[s] de 5,3% des abus sexuels vécus par les jeunes Québécois[·es] » (INSPQ, p.238) en plus d’avoir fait subir des violences psychologiques (vécues par 23% des jeunes) et physiques (6,8%) aux jeunes qu’ils et elles entrainent (Idem). 

De plus, certain·es entraineur·ses utilisent les insultes et l’humiliation pour « stimuler » la performance de leurs athlètes malgré le fait que ces techniques ont, la plupart du temps, des effets négatifs sur tout le monde. Entre autres, on « [peut observer] certaines répercussions spécifiques telles que l’abandon du sport pratiqué ou même du sport de façon générale, la baisse des performances et un stress accru lié aux entrainements et aux compétitions. » (INSPQ) sans mentionner une baisse de l’estime de soi et de la confiance en ses capacités. Si les interventions consistent systématiquement à nommer les erreurs et jamais les bons coups, on limite le développement des athlètes. À long terme, ces violences peuvent aussi mener à des troubles de santé mentale. 

À l’inverse, en cultivant un environnement empreint de bienveillance, l'équipe d’entrainement participe à créer un milieu sécuritaire qui permet aux participant·es de s’épanouir, de développer une meilleure estime d’eux et d’elles-mêmes, mais aussi de leurs pairs et de leur confiance en leur capacités. Ainsi, on augmente les performances sportives en développant une meilleure reconnaissance des limites et des forces de toute l’équipe. Si je sais que je suis excellent·e pour faire des passes, mais médiocre pour tirer au but, je vais être en mesure d’adapter mon style de jeu et de maximiser la performance de mon équipe en effectuant de bonnes passes aux meilleur·es compteur·ses. 

Certaines des formes de violences moins reconnues qui peuvent être perpétrées par l’équipe d’entrainement sont : l’entrainement malgré des blessures, l’imposition de régimes alimentaires et de diètes strictes et le dopage imposé (INSPQ, p.263). Toutes ces violences peuvent avoir des effets néfastes autant au niveau physique (aggravation des blessures, fatigue, perte ou prise de poids drastiques, etc.) que psychologique. Veillez à respecter les limites de vos athlètes et à les encourager à nommer leur inconfort ou leur fatigue dans le but de favoriser un rapport sain à l’entrainement et à la compétition. 

 

Violences de la part des spectateur·rices/parents 

Les personnes qui assistent aux compétitions sportives peuvent aussi participer à la violence en contexte sportif. Que les gestes, les propos ou les attitudes violents soient dirigés envers les athlètes, l’équipe d’entrainement ou les arbitres, elles sont inadéquates. En tant que responsable, vous vous devez de faire comprendre aux spectateur·rices que ces comportements sont inacceptables et nuisent à votre équipe et à sa réputation. Ces personnes sont là pour encourager, pas pour intimider ou insulter les personnes qui participent à l’activité sportive. Plus encore, les violences verbales et les agressions physiques peuvent créer de la peur, de la frustration et mener à une baisse de l’estime de soi chez les athlètes2. Dans les cas de compétitions sportives avec des athlètes mineur∙es, informez les parents de prime abord de vos attentes face à leur comportement dans les estrades. 

N’encouragez pas les chants dénigrants ou les commentaires humiliants. Si certain·es spectateur·rices continuent d’avoir des comportements inadéquats malgré tout, vous pouvez essayer de les rencontrer après la partie pour mentionner votre inconfort avec la situation. Si les comportements continuent, vous pouvez les expulser de la partie. 

 

Le contexte social de la violence dans le sport 

Toutes ces formes de violences sont inscrites dans un contexte social bien particulier. Afin de mener des interventions adéquates et de prévenir la violence, assurez-vous d'effectuer un travail de déconstruction par rapport à vos préconceptions sur la place de la violence dans le sport. Effectivement, la violence et l’agressivité excessive sont souvent encouragées dans le monde du sport, surtout chez les garçons et les hommes, comme les démonstrations de force sont souvent associées à la masculinité. Par exemple il est de votre responsabilité de rappeler que le but d’un placage est de reprendre possession de la rondelle/du ballon, pas de blesser l’adversaire ou de faire une démonstration de domination. 

Plus encore, vu les systèmes d’oppression multiples qui informent nos comportements et nos visions du monde, il est pertinent de garder l’œil ouvert pour prévenir la discrimination. Effectivement, les personnes issues de groupes minorisés (issue de la diversité sexuelle et de genre, personnes racisées, etc.) sont plus susceptibles de subir des violences de toutes sortes qu'elles viennent de leurs pairs, de leurs entraineur·ses ou des spectateur·rices. 

 

Cultiver la bienveillance en contexte sportif 

Enfin, pour favoriser le développement des athlètes, leurs performances sportives et leur estime d’eux et d’elles-mêmes, vous devez, en tant qu’entraineur·se cultiver la bienveillance et le respect en tout temps. Pour ce faire, menez des interventions positives en renforçant les bons coups et en corrigeant les erreurs de manière technique ou tactique plutôt qu’avec une réponse émotionnelle. Veillez à ce que les relations entre les membres de votre équipe soient coopératives plutôt que compétitives. Ne tolérez jamais la violence entre les participant·es, envers les arbitres ou de la part des spectateur·rices. 

Pour éviter les violences des athlètes envers eux ou elles-mêmes (diète extrême, entrainement malgré des blessures, faible estime de soi, automutilation, etc.) établissez une relation de confiance dans le but de faciliter le processus de dévoilement de la violence, de l’inconfort et des limites des athlètes. Ne stigmatisez pas les participant·es selon le genre, l’orientation sexuelle, le poids ou tout autre critère d’identification personnel. Par exemple, si vous en avez la capacité, déconstruisez le rapport entre poids, santé physique et performance pour prévenir la grossophobie chez les participant·es. 

Effectivement, la prévention est le meilleur moyen de limiter l’émergence de violences et d’être préparé à réagir de manière structurée. De plus, il est important d’éviter de normaliser et de banaliser la violence (même si elle fait partie de la pratique sportive en question) pour éviter l’utilisation de force excessive autant à l’entrainement qu’en compétition.  

Si vous souhaitez vous outiller davantage, plusieurs formations sont disponibles dans le but de vous préparer aux différentes éventualités (Respect et sport et Prise de décisions éthiques du Programme national de certification des entraineurs).

 

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